OPP Guadeloupe
Observer le paysage, pa.emment et avec assiduité, comme je le fais depuis près de quinze ans dans divers cadres collabora.fs cons.tue une démarche photographique toute en.ère tournée vers l’ausculta.on des usages individuels et des pra.ques collec.ves de l’espace. Scruter ainsi le paysage quo.dien pour y décrypter les manières d’habiter les lieux, les façons de s’y déplacer et d’en consommer les ressources permet à mon sens de décaler u.lement le centre de gravité des aDen.ons habituellement portées au paysage.
En juin 2016, lorsque je suis arrivé en Guadeloupe, c’est avec un sen.ment étrange et ambigu que j’ai découvert ceDe terre française si éloignée de celle où j’ai grandit et où je vis, de l’autre côté de l’océan atlan.que, outre-mer. Et c’est l’esprit chargé des clichés de plages et de coco.ers dont l’imagerie touris.que con.nue d’affubler les An.lles, ces territoires devenus français par les affres de l’histoire coloniale, que j’ai parcouru l’archipel Guadeloupe.
Les lieux auxquels je me suis aDachés, entre 2016 et 2021, disent la violence de ce paradoxe. Les paysages que j’ai considérés, souvent puissants et parfois d’une grande beauté, portent en eux la marque d’une histoire des lieux et témoignent des instabilités économiques, sociales et environnementales à l’oeuvre en Guadeloupe. Ces paysages français, ces paysages créoles, prennent parfois même des accents américains, ce que ne contredit pas la géographie des lieux. Ils témoignent de l’iden.té contemporaine mul.ple de ce territoire de la Caraïbe et donnent à voir la façon dont l’urbain gagne sur le rural, ainsi que l’uniformisa.on progressive des architectures comme des paysages qui l’accompagne ; évolu.on inéluctable que semble tout juste contrarier, ici ou là, les résistances obs.nées du végétal.
Sylvain Duffard
Vitry-sur-Seine, le 17 avril 2022